L'histoire des moteurs à combustion représente l'une des avancées les plus décisives de la révolution industrielle, transformant radicalement nos modes de transport et de production d'énergie. Des premières machines à vapeur aux moteurs diesel sophistiqués, cette évolution technologique s'étend sur plus de trois siècles d'innovations continues. Ces inventions ont non seulement permis l'essor de l'automobile et de l'aviation, mais ont également façonné notre société moderne en révolutionnant les capacités de production industrielle et en redéfinissant nos modes de déplacement. L'ingéniosité des pionniers comme Newcomen, Lenoir, Otto et Diesel a établi les fondements théoriques et pratiques sur lesquels reposent encore aujourd'hui nos systèmes énergétiques et nos moyens de transport.
Origines et précurseurs des moteurs à combustion (1700-1850)
La quête d'une source d'énergie mécanique efficace débute véritablement au début du XVIIIe siècle, période où les innovations techniques commencent à se multiplier en Europe. Confrontés aux limites de la force humaine et animale, les inventeurs cherchent alors à exploiter de nouvelles sources d'énergie pour répondre aux besoins grandissants de l'industrie naissante. Cette période voit l'émergence des premiers dispositifs capables de transformer l'énergie thermique en mouvement mécanique, posant ainsi les jalons conceptuels qui mèneront aux moteurs à combustion interne du XIXe siècle.
Les premières tentatives d'exploitation de la force de la vapeur remontent à l'Antiquité avec Héron d'Alexandrie, mais c'est véritablement à partir du XVIIIe siècle que les applications pratiques commencent à voir le jour. L'énergie thermique, jusqu'alors principalement utilisée pour le chauffage et la métallurgie, devient progressivement une source de puissance mécanique exploitable industriellement. Les ingénieurs de cette époque réalisent que la chaleur peut être convertie en travail mécanique à travers différents cycles thermodynamiques, ouvrant ainsi la voie aux machines à vapeur puis aux moteurs à combustion interne.
La machine à vapeur atmosphérique de newcomen (1712)
Thomas Newcomen, forgeron et quincaillier anglais, développe en 1712 la première machine à vapeur atmosphérique véritablement fonctionnelle et commercialement viable. Contrairement aux tentatives précédentes de Thomas Savery, la machine de Newcomen utilise un piston dans un cylindre, principe qui deviendra fondamental dans l'évolution des moteurs. Son invention, initialement conçue pour pomper l'eau des mines inondées, représente un tournant majeur dans l'histoire technologique.
Le fonctionnement de la machine de Newcomen repose sur un principe relativement simple : la vapeur introduite dans le cylindre est condensée par injection d'eau froide, créant un vide partiel. La pression atmosphérique pousse alors le piston vers le bas, produisant le mouvement. Malgré son rendement thermique modeste (environ 1%), cette machine représente la première conversion pratique et fiable de l'énergie thermique en énergie mécanique à grande échelle.
L'impact de l'invention de Newcomen sur l'industrie minière britannique fut considérable. En permettant l'extraction de l'eau des mines profondes, elle contribua à l'expansion de l'industrie du charbon, fournissant ainsi le combustible nécessaire à la révolution industrielle naissante. Cette machine, bien que volumineuse et gourmande en combustible, resta en service pendant près de 75 ans avant d'être progressivement remplacée par les machines plus efficaces de James Watt.
Le moteur stirling écossais et son cycle thermodynamique (1816)
En 1816, le pasteur écossais Robert Stirling invente un moteur à air chaud qui présente une innovation majeure : il s'agit du premier moteur à combustion externe utilisant un cycle thermodynamique fermé. Contrairement aux machines à vapeur, le moteur Stirling n'expulse pas son fluide de travail mais le recycle continuellement, lui conférant une efficacité théorique remarquable.
Le cycle Stirling comprend quatre phases thermodynamiques distinctes : compression isotherme, chauffage isochore, détente isotherme et refroidissement isochore. Cette configuration permet théoriquement d'atteindre le rendement maximal du cycle de Carnot, ce qui en fait l'un des cycles les plus efficaces conceptuellement. Le moteur Stirling se distingue également par sa capacité à fonctionner avec pratiquement n'importe quelle source de chaleur externe, qu'il s'agisse de combustibles fossiles, d'énergie solaire ou même de chaleur résiduelle industrielle.
Le moteur Stirling représente l'une des innovations les plus élégantes de son époque, combinant simplicité mécanique et sophistication thermodynamique dans une conception qui reste pertinente deux siècles plus tard.
Malgré ses avantages théoriques, les défis pratiques liés aux matériaux disponibles à l'époque limitèrent son adoption industrielle immédiate. Les problèmes d'étanchéité et d'échange thermique efficace constituaient des obstacles majeurs. Néanmoins, le moteur Stirling établit des principes fondamentaux qui influenceront durablement le développement des moteurs thermiques et connaîtra un regain d'intérêt au XXe siècle pour des applications spécialisées.
Les expériences de françois isaac de rivaz avec l'hydrogène (1807)
Bien avant que le pétrole ne devienne le combustible de prédilection des moteurs, l'inventeur suisse François Isaac de Rivaz réalise en 1807 une percée remarquable en développant le premier moteur à combustion interne utilisant l'hydrogène comme carburant. Son dispositif, rudimentaire mais révolutionnaire, combine un piston, un cylindre et un système d'allumage électrique pour enflammer un mélange d'hydrogène et d'air.
De Rivaz installe son moteur sur un chariot primitif, créant ainsi le premier véhicule propulsé par un moteur à combustion interne. Bien que peu puissant et extrêmement inefficace, ce véhicule expérimental démontre pour la première fois la possibilité d'utiliser l'énergie chimique d'un combustible gazeux pour produire directement une force motrice, sans passer par la phase intermédiaire de la vapeur.
L'invention de de Rivaz, bien que restée au stade expérimental, anticipe de plusieurs décennies les futurs développements des moteurs à explosion. Son approche novatrice de l'allumage électrique et de l'utilisation d'un combustible gazeux pose les bases conceptuelles qui seront reprises et perfectionnées par ses successeurs. Ironiquement, deux siècles plus tard, l'hydrogène fait l'objet d'un regain d'intérêt comme carburant potentiel dans le cadre de la transition énergétique, conférant une pertinence renouvelée aux travaux pionniers de l'inventeur suisse.
Le moteur à air chaud de robert stirling et ses applications industrielles
Au-delà de sa conception théorique brillante, le moteur Stirling trouva diverses applications pratiques au cours du XIXe siècle. Dans les années 1830-1860, des modèles commerciaux de moteurs Stirling furent produits pour le pompage d'eau et diverses opérations industrielles légères, principalement dans les petits ateliers et exploitations agricoles. Ces moteurs offraient plusieurs avantages pratiques par rapport aux machines à vapeur contemporaines : absence de risque d'explosion de chaudière, fonctionnement silencieux et maintenance réduite.
Les frères James et Robert Stirling perfectionnèrent continuellement le concept, notamment en introduisant l'élément désormais connu sous le nom de "régénérateur" ou "économiseur thermique". Ce composant, qui stocke temporairement la chaleur entre les cycles, contribua significativement à l'amélioration du rendement. En 1843, ils développèrent un moteur Stirling capable de produire 2,5 chevaux-vapeur pour l'alimentation d'une fonderie à Dundee, en Écosse.
Malgré ces succès initiaux, le moteur Stirling fut progressivement éclipsé par les machines à vapeur plus puissantes et, plus tard, par les moteurs à combustion interne. Toutefois, son principe a perduré et connaît aujourd'hui un renouveau dans des applications spécialisées comme la cryogénie, la cogénération et les systèmes à énergie solaire concentrée, où son efficacité théorique élevée et sa polyvalence énergétique représentent des atouts considérables.
L'avènement des moteurs à combustion interne au XIXe siècle
Le XIXe siècle marque un tournant décisif dans l'histoire des moteurs avec le passage progressif de la combustion externe (machines à vapeur, moteurs Stirling) à la combustion interne. Cette évolution fondamentale permet d'éliminer les intermédiaires dans la conversion d'énergie, offrant des gains substantiels en efficacité, en compacité et en puissance spécifique. La seconde moitié du siècle voit ainsi fleurir une multitude d'innovations qui posent les bases de la motorisation moderne.
Cette période correspond également à l'émergence de nouvelles sources d'énergie. Le gaz d'éclairage, alors largement disponible dans les zones urbaines industrialisées, offre un combustible pratique pour les premiers moteurs fixes. Parallèlement, les produits pétroliers commencent à être raffinés et standardisés, préparant le terrain pour la future domination des carburants liquides. Les inventeurs de cette époque travaillent dans un contexte d'industrialisation rapide où la demande pour des sources d'énergie fiables et efficaces ne cesse de croître.
Le moteur à gaz de lenoir et sa commercialisation pionnière (1860)
En 1860, l'ingénieur belge Jean Joseph Étienne Lenoir présente le premier moteur à combustion interne commercialement viable. Son moteur à gaz, qui fonctionne sans phase de compression préalable, utilise un mélange d'air et de gaz d'éclairage enflammé par une étincelle électrique. Cette innovation marque une rupture avec les machines à vapeur qui dominaient alors l'industrie.
Le moteur de Lenoir fonctionne selon un cycle à deux temps simplifié : le piston aspire le mélange air-gaz pendant la première moitié de sa course, puis une étincelle électrique enflamme ce mélange, provoquant une explosion qui pousse le piston pour produire un travail mécanique. Malgré un rendement limité (environ 5%), ce moteur présente l'avantage considérable de démarrer immédiatement, sans la longue phase de chauffe nécessaire aux machines à vapeur.
Le succès commercial du moteur Lenoir fut rapide et significatif. En quelques années, plus de 500 unités furent installées dans des ateliers et petites industries à travers l'Europe. En 1863, Lenoir adapte même son moteur pour propulser un véhicule expérimental, préfigurant ainsi l'avenir de l'automobile. Bien que limité par sa faible efficacité énergétique et sa puissance modeste, le moteur Lenoir démontre la viabilité pratique du concept de combustion interne et inspire une nouvelle génération d'inventeurs.
Alphonse beau de rochas et le cycle à quatre temps théorique (1862)
En 1862, l'ingénieur français Alphonse Beau de Rochas publie un mémoire théorique fondamental dans lequel il expose les principes du cycle à quatre temps. Bien qu'il n'ait jamais construit lui-même de moteur fonctionnel, sa contribution théorique s'avère déterminante pour l'évolution des moteurs à combustion interne.
Beau de Rochas identifie quatre opérations successives indispensables pour obtenir un rendement optimal : aspiration, compression, combustion-détente et échappement. Il est le premier à comprendre pleinement l'importance cruciale de la phase de compression préalable du mélange air-carburant, qui permet d'augmenter considérablement le rendement thermodynamique du moteur. Son analyse mathématique démontre qu'une compression adéquate avant l'allumage multiplie l'énergie disponible lors de la phase d'expansion.
Le brevet de Beau de Rochas contient également d'autres principes novateurs, comme l'importance du rapport volumétrique optimal, la nécessité d'une combustion rapide et l'avantage d'un refroidissement efficace. Malheureusement, faute de moyens financiers pour maintenir son brevet, ses travaux tombent dans le domaine public et c'est Nikolaus Otto qui mettra en pratique ces principes quelques années plus tard, donnant naissance au célèbre "cycle Otto" qui n'est autre que l'application concrète des théories de Beau de Rochas.
Le moteur Otto-Langen et la révolution du rendement énergétique (1867)
En 1867, l'inventeur allemand Nikolaus August Otto, associé à Eugen Langen, présente à l'Exposition Universelle de Paris un moteur atmosphérique à gaz qui constitue une amélioration significative par rapport au moteur de Lenoir. Cette machine, qui remporte la médaille d'or de l'exposition, utilise le principe du piston libre et offre un rendement trois fois supérieur à celui du moteur Lenoir.
Le moteur Otto-Langen fonctionne selon un principe original : l'explosion du mélange air-carburant projette un piston libre vers le haut d'un cylindre vertical. Ce piston, non relié directement à un vilebrequin, est ensuite ramené vers le bas par son propre poids et la pression atmosphérique, transmettant l'énergie mécanique via un système de crémaillère et d'embrayage à sens unique. Ce fonctionnement particulier permet d'exploiter plus efficacement l'énergie de l'explosion.
Le succès commercial du moteur Otto-Langen est immédiat. La société Deutz AG, fondée par Otto et ses associés, en produira plus de 5 000 exemplaires. Cette machine, bien qu'encombrante et bruyante, représente une étape cruciale dans l'évolution des moteurs à combustion interne en démontrant qu'ils peuvent rivaliser avec les machines à vapeur en termes d'efficacité. Elle prépare le terrain pour l'introduction du moteur à quatre temps qui révolutionnera définitivement l'industrie quelques années plus tard.
Le cycle atkinson et sa quête d'efficacité thermique améliorée (1882)
En 1882, l'ingénieur britann
ique James Atkinson propose une version améliorée du cycle à quatre temps en développant un moteur avec un cycle thermodynamique unique, aujourd'hui connu sous le nom de cycle Atkinson. Cette innovation vise à surmonter l'une des limitations fondamentales du cycle Otto : l'équilibre entre le taux de compression et le taux de détente.
Le principe ingénieux du cycle Atkinson consiste à dissocier ces deux paramètres grâce à un mécanisme de bielle-manivelle complexe permettant une course de détente plus longue que la course de compression. Cette asymétrie permet d'extraire davantage d'énergie des gaz en expansion, améliorant ainsi le rendement thermique global du moteur. Dans son brevet original, Atkinson décrit un mécanisme à joints multiples qui produit quatre courses de piston inégales par cycle.
Bien que mécaniquement complexe et limitant la puissance spécifique du moteur, le cycle Atkinson offre une efficacité thermique remarquable pour l'époque. Cette caractéristique sera particulièrement appréciée dans les applications stationnaires où le rendement prime sur la compacité. Le concept d'Atkinson, longtemps resté marginal dans l'histoire des moteurs, connaîtra un regain d'intérêt spectaculaire plus d'un siècle plus tard avec l'avènement des véhicules hybrides, où son efficacité énergétique constitue un atout majeur.
Perfectionnements techniques et industrialisation (1870-1900)
Le dernier quart du XIXe siècle constitue une période d'innovation fulgurante dans le domaine des moteurs à combustion interne. Les principes fondamentaux étant désormais établis, les efforts se concentrent sur l'amélioration des performances, la fiabilisation et surtout l'industrialisation à grande échelle. Cette période voit l'émergence de véritables géants industriels dont les noms restent emblématiques de l'histoire automobile.
Les améliorations techniques se multiplient à un rythme soutenu : carburation plus précise, systèmes d'allumage plus fiables, matériaux plus résistants et méthodes de fabrication standardisées. Les applications se diversifient également, les moteurs à combustion interne s'imposant progressivement dans des domaines aussi variés que le transport, l'agriculture et l'industrie légère. Cette diffusion rapide s'explique non seulement par les performances croissantes de ces moteurs, mais aussi par leur praticité d'utilisation comparée aux machines à vapeur.
Le moteur à quatre temps de nikolaus otto et sa diffusion mondiale
En 1876, Nikolaus Otto réalise une percée décisive en construisant le premier moteur à quatre temps véritablement fonctionnel, concrétisant ainsi les principes théoriques énoncés par Beau de Rochas quatorze ans plus tôt. Ce moteur horizontal monocylindre, avec son volant d'inertie massif et sa distribution par tiroir, établit un standard qui allait perdurer pendant des décennies.
La conception d'Otto intègre plusieurs innovations cruciales, notamment un système d'admission contrôlé permettant d'obtenir un mélange air-carburant homogène et un mécanisme de distribution synchronisé avec le vilebrequin. Ces caractéristiques, combinées à la compression préalable du mélange avant l'allumage, permettent d'atteindre un rendement thermique de l'ordre de 14% - une amélioration considérable par rapport aux 5% du moteur Lenoir.
Le moteur à quatre temps d'Otto représente une révolution aussi importante pour l'industrie que l'était la machine à vapeur de Watt un siècle plus tôt, ouvrant la voie à une nouvelle ère de mécanisation légère et décentralisée.
La société Deutz AG, fondée par Otto, commence la production en série de ce moteur qui connaît un succès international immédiat. En dix ans, plus de 30 000 exemplaires sont vendus à travers le monde, établissant le moteur à quatre temps comme la référence incontournable pour les applications stationnaires. Des licences sont accordées à des fabricants dans plusieurs pays, accélérant sa diffusion mondiale et posant les bases d'une véritable révolution industrielle.
Le motorwagen de karl benz et l'application automobile (1885)
En 1885, l'ingénieur allemand Karl Benz franchit une étape décisive en intégrant un moteur à combustion interne à un véhicule spécialement conçu - le Benz Patent-Motorwagen. Contrairement aux tentatives précédentes qui adaptaient des moteurs à des véhicules existants, Benz développe une conception intégrée où chaque élément est pensé pour l'automobilité.
Le Motorwagen est propulsé par un moteur monocylindre horizontal à quatre temps développant 0,75 chevaux à 400 tours/minute. Refroidi par eau et alimenté en essence, ce moteur léger est admirablement intégré au châssis tubulaire du véhicule à trois roues. L'innovation ne se limite pas au moteur : Benz développe également un système d'allumage électrique fiable, un carburateur évaporatif de sa conception et un système rudimentaire mais efficace de refroidissement par eau.
Le 29 janvier 1886, Benz obtient le brevet allemand numéro 37435 pour son "véhicule propulsé par un moteur à gaz", document désormais considéré comme l'acte de naissance de l'automobile moderne. La première démonstration publique a lieu à Mannheim durant l'été 1886, où le véhicule atteint la vitesse de 16 km/h. Le voyage promotionnel de Bertha Benz, épouse de l'inventeur, qui parcourt 106 kilomètres au volant du Motorwagen en 1888, démontre de façon éclatante la viabilité pratique de cette nouvelle technologie.
Gottlieb daimler et le moteur à essence haute vitesse phoenix (1883)
Parallèlement aux travaux de Benz, Gottlieb Daimler, ancien directeur technique chez Deutz, développe avec son associé Wilhelm Maybach une approche différente du moteur à combustion interne. Plutôt que de chercher à optimiser les moteurs stationnaires lents et lourds, il se concentre sur la conception de moteurs légers à haute vitesse de rotation, spécifiquement adaptés aux applications mobiles.
En 1883, Daimler et Maybach conçoivent le "moteur Phoenix", un moteur vertical monocylindre à quatre temps capable d'atteindre l'incroyable vitesse de 900 tours par minute - près de trois fois supérieure à celle des moteurs contemporains. Cette performance est rendue possible par plusieurs innovations : un système d'allumage à tube incandescent, une chambre de combustion optimisée et surtout l'invention du "champignon d'admission" - l'ancêtre des soupapes modernes - qui améliore considérablement le remplissage du cylindre à haute vitesse.
Le moteur Phoenix, qui ne pèse que 40 kg pour une puissance de 1 cheval, ouvre des perspectives entièrement nouvelles pour la motorisation de véhicules légers. Daimler l'adapte successivement à une moto en 1885 (considérée comme la première motocyclette), à une voiture en 1886, à un bateau en 1887 et même à un dirigeable en 1888, démontrant ainsi la polyvalence exceptionnelle de sa conception. Cette approche universelle de la motorisation posera les bases de l'entreprise Daimler Motoren Gesellschaft, fondée en 1890, qui deviendra l'un des plus importants constructeurs automobiles mondiaux.
L'allumage par magnéto de robert bosch et son impact sur la fiabilité (1887)
L'un des principaux obstacles au développement des moteurs à essence était la fiabilité de l'allumage. Les systèmes à tube incandescent utilisés par Daimler étaient dangereux et peu pratiques, tandis que les systèmes à pile et bobine d'induction souffraient d'une autonomie limitée. En 1887, l'ingénieur allemand Robert Bosch apporte une solution décisive en développant un système d'allumage par magnéto basse tension pour les moteurs stationnaires.
Le dispositif de Bosch exploite le principe d'induction électromagnétique découvert par Faraday : une bobine mobile dans un champ magnétique génère un courant électrique. Appliqué au moteur, ce système produit l'étincelle nécessaire à l'allumage sans nécessiter de source d'énergie externe. La rotation même du moteur alimente le système, garantissant une autonomie illimitée tant que le moteur tourne.
En 1897, Bosch perfectionne son invention en développant la magnéto haute tension qui élimine le besoin d'un rupteur mécanique dans la chambre de combustion. Ce système, rapidement adopté par les constructeurs automobiles du monde entier, représente une avancée fondamentale en termes de fiabilité. L'entreprise fondée par Bosch devient le leader mondial des systèmes d'allumage, posant les fondations d'un groupe industriel qui reste aujourd'hui l'un des principaux équipementiers automobiles mondiaux.
L'innovation du moteur diesel et son développement
La fin du XIXe siècle voit émerger une nouvelle approche radicale du moteur à combustion interne avec l'invention du moteur Diesel. Cette innovation majeure repose sur un principe fondamentalement différent des moteurs à allumage commandé développés jusqu'alors : l'auto-inflammation du carburant sous l'effet de la compression, sans recours à un système d'allumage externe.
Ce nouveau type de moteur offre des avantages considérables en termes de rendement énergétique et de polyvalence des carburants utilisables. Son développement, d'abord orienté vers les applications industrielles lourdes et stationnaires, ouvrira progressivement la voie à une diversification des technologies de motorisation, complémentaire au moteur à essence pour les décennies à venir.
Théorie thermodynamique et brevet original de rudolf diesel (1892)
Rudolf Diesel, ingénieur allemand formé à l'École polytechnique de Munich, développe sa conception révolutionnaire à partir d'une approche théorique rigoureuse. Son ambition initiale est de créer un moteur qui se rapprocherait du cycle idéal de Carnot, permettant ainsi d'atteindre un rendement thermodynamique bien supérieur à celui des moteurs existants.
En 1892, Diesel dépose son premier brevet intitulé "Procédé de production de travail moteur par la combustion de combustibles". Sa théorie repose sur un principe fondamental : en comprimant suffisamment l'air dans un cylindre, la température atteinte devient suffisante pour enflammer spontanément le carburant injecté. Cette approche élimine le besoin d'un système d'allumage externe et permet d'utiliser des taux de compression beaucoup plus élevés que dans les moteurs à essence, améliorant ainsi considérablement le rendement thermique.
Dans son brevet, Diesel envisage initialement d'utiliser de la poussière de charbon comme combustible, injectée progressivement pendant la course de détente pour maintenir une température constante, conformément au cycle de Carnot. Cette vision théorique se heurtera cependant à d'importantes difficultés pratiques qui l'obligeront à modifier considérablement sa conception initiale, notamment en abandonnant l'injection progressive au profit d'une injection plus concentrée et en substituant les combustibles liquides à la poussière de charbon.
Les prototypes MAN et la première centrale électrique diesel (1897)
Le développement pratique du moteur Diesel débute en 1893 lorsque la société Maschinenfabrik Augsburg-Nürnberg (MAN) s'engage à financer les recherches de l'inventeur. Les premiers prototypes se heurtent à de nombreux obstacles techniques : problèmes d'injection du combustible, difficultés de résistance mécanique face aux pressions élevées, et défis liés à la régulation précise du fonctionnement.
Après plusieurs tentatives infructueuses et de nombreuses modifications par rapport au concept original, un prototype fonctionnel est finalement présenté en février 1897. Ce moteur monocylindre développe 20 chevaux à 172 tours/minute avec un rendement de 26% - presque deux fois supérieur à celui des meilleurs moteurs à vapeur de l'époque. Contrairement à la vision initiale de Diesel, ce moteur utilise du pétrole lampant comme carburant et abandonne l'idée d'une combustion isotherme.
Le succès de ce prototype conduit rapidement à des applications industrielles. En 1898, la première centrale électrique équipée d'un moteur Diesel est mise en service à Saint-Pétersbourg. D'une puissance de 30 chevaux, ce moteur alimente l'éclairage d'une usine textile. La même année, la société Burmeister & Wain acquiert une licence pour produire des moteurs Diesel au Danemark, initiant ainsi la diffusion internationale de cette technologie qui s'imposera rapidement dans les applications nécessitant une puissance importante et un fonctionnement continu.
L'évolution des systèmes d'injection directe pour moteurs diesel
L'un des défis majeurs du développement du moteur Diesel concernait le système d'injection du carburant. Les premiers moteurs utilisaient de l'air comprimé pour pulvériser le combustible dans la chambre - un système encombrant et énergivore. L'évolution vers des systèmes d'injection directe plus efficaces constitue une étape cruciale dans l'amélioration des performances et la diffusion de cette technologie.
En 1905, Prosper L'Orange, ingénieur chez Benz, développe une pompe d'injection mécanique qui améliore considérablement la précision et la fiabilité de l'alimentation en carburant. Cette innovation est suivie en 1910 par l'introduction de la préchambre de combustion, qui facilite l'allumage du carburant dans des moteurs plus compacts et fonctionnant à des régimes plus élevés. En 1927, Robert Bosch présente sa première pompe d'injection en ligne, standardisant et industrialisant la production de ces composants critiques.
Ces avancées dans les systèmes d'injection permettent progressivement d'adapter les moteurs Diesel à des applications plus diversifiées, dépassant le cadre initial des installations industrielles fixes. Le perfectionnement des injecteurs, l'amélioration de la précision des pompes et l'augmentation des pressions d'injection contribuent significativement à l'évolution des performances, ouvrant la voie à l'utilisation des moteurs Diesel dans les véhicules routiers et ferroviaires.
Applications marines du moteur diesel par sulzer et burmeister & wain
Le domaine maritime constitue l'un des premiers secteurs où le moteur