La sécurité passive des véhicules a connu une révolution silencieuse depuis les années 1950, avec l'avènement des zones de déformation programmée. Ces structures ingénieuses jouent un rôle crucial lors d'un impact, en absorbant et en dissipant l'énergie cinétique de la collision avant qu'elle n'atteigne les occupants. Aujourd'hui, ces zones savamment conçues font partie intégrante de tous les véhicules modernes et contribuent significativement à la réduction des blessures graves et des décès sur les routes. L'industrie automobile a progressivement perfectionné ces technologies, combinant des matériaux innovants, des structures complexes et des simulations informatiques avancées pour créer des véhicules capables de protéger leurs occupants même lors d'impacts à haute vitesse.

La conception des zones de déformation répond à un principe fondamental : sacrifier certaines parties du véhicule pour préserver l'intégrité de l'habitacle et, par conséquent, la vie des passagers. Leur efficacité repose sur une compréhension approfondie de la physique des collisions et sur l'intégration de multiples couches de protection stratégiquement positionnées. Ces innovations techniques ont transformé la sécurité automobile, faisant passer le taux de survie lors d'accidents graves de situations autrefois désespérées à des chances de survie remarquablement élevées dans les véhicules modernes.

Principes physiques des zones de déformation programmée

Les zones de déformation programmée fonctionnent selon des principes physiques fondamentaux liés à la gestion de l'énergie. Lors d'une collision, l'énergie cinétique d'un véhicule doit être dissipée d'une manière ou d'une autre. Sans zones de déformation, cette énergie serait transmise directement aux occupants, provoquant des blessures graves voire mortelles. Le principe fondamental est donc de créer des structures qui se déforment de manière contrôlée pour absorber cette énergie, en la convertissant en déformation du métal plutôt qu'en force transmise aux passagers.

La loi de conservation de l'énergie est au cœur de ce concept. L'énergie cinétique d'un véhicule en mouvement est proportionnelle à sa masse et au carré de sa vitesse (E = ½mv²). Cette énergie ne peut pas être simplement éliminée lors d'un impact, mais elle peut être transformée. Les zones de déformation convertissent cette énergie cinétique en travail mécanique nécessaire pour plier et déformer le métal. Chaque pli, chaque compression des structures métalliques absorbe une partie de l'énergie de l'impact, réduisant ainsi la décélération subie par les occupants.

La conception des zones de déformation repose également sur le concept de décélération progressive. Plus la distance sur laquelle un véhicule peut ralentir est grande, plus la force moyenne exercée sur les occupants est faible. Cette relation est exprimée par la formule F = ma, où la force (F) est égale à la masse (m) multipliée par l'accélération (a). En prolongeant le temps de décélération grâce à des zones qui s'écrasent progressivement, on réduit l'accélération négative (décélération) et donc les forces subies par le corps humain.

Les ingénieurs utilisent également le principe des structures à résistance différentielle. Certaines parties du véhicule sont délibérément conçues pour être plus faibles et se déformer en premier, tandis que d'autres, comme la cage de l'habitacle, sont renforcées pour rester intactes. Cette hiérarchie de résistance guide la déformation de manière prévisible et protège l'espace vital des occupants.

La zone de déformation idéale absorbe l'énergie de manière linéaire, en maintenant une force constante tout au long de sa compression, maximisant ainsi l'absorption d'énergie tout en minimisant les pics de décélération qui peuvent causer des traumatismes aux passagers.

Le comportement en cascade est un autre aspect fondamental : les différentes parties des zones de déformation sont conçues pour s'écraser séquentiellement, permettant une absorption d'énergie plus efficace. Ce séquençage précis des déformations représente l'un des aspects les plus sophistiqués de la conception automobile moderne.

Évolution historique des structures déformables dans l'industrie automobile

L'histoire des structures déformables dans l'industrie automobile reflète l'évolution progressive de notre compréhension de la sécurité passive. Pendant les premières décennies de l'automobile, les véhicules étaient construits avec des châssis rigides, considérés comme plus robustes et donc plus sûrs. Cette conception était fondamentalement erronée d'un point de vue physique, car ces structures transmettaient directement les forces d'impact aux occupants. Il a fallu attendre les années 1950 pour que ce paradigme commence à changer radicalement, grâce à des pionniers visionnaires de la sécurité automobile.

Les innovations de béla barényi chez Mercedes-Benz dans les années 1950

Béla Barényi, ingénieur chez Mercedes-Benz, est souvent considéré comme le père des zones de déformation programmée. Dans les années 1950, il a développé et breveté le concept révolutionnaire de la "cellule de sécurité" entourée de zones de déformation. Son innovation fondamentale reposait sur la division de la structure du véhicule en trois zones distinctes : une zone avant déformable, une cellule centrale rigide pour les passagers, et une zone arrière également déformable.

La première application commerciale de cette théorie est apparue en 1959 sur la Mercedes-Benz W111 (série 220). Cette voiture présentait des zones avant et arrière spécifiquement conçues pour se comprimer progressivement lors d'un impact, absorbant l'énergie cinétique avant qu'elle n'atteigne l'habitacle. Cette innovation représentait un changement radical dans la conception automobile, passant d'une philosophie de rigidité totale à une approche de déformation contrôlée.

Barényi a également introduit le concept de colonne de direction déformable, conçue pour se comprimer plutôt que de pénétrer dans l'habitacle lors d'un impact frontal. Cette innovation a considérablement réduit les blessures thoraciques mortelles, fréquentes dans les accidents de l'époque. Son approche holistique de la sécurité passive a établi les fondements des principes de conception qui régissent encore aujourd'hui la sécurité automobile.

L'adoption progressive des zones de déformation par volvo et saab

Les constructeurs scandinaves, particulièrement Volvo et Saab, ont joué un rôle crucial dans l'adoption et le perfectionnement des zones de déformation programmée. Dans les années 1960, Volvo a intégré des structures déformables avant et arrière dans ses modèles, notamment la série 140, en mettant l'accent sur des tests d'impact rigoureux pour valider leur efficacité. L'entreprise suédoise a été pionnière dans l'utilisation de zones de déformation multiples, avec des structures conçues pour absorber l'énergie de manière séquentielle.

Saab, avec son héritage aéronautique, a apporté une perspective unique à la conception des zones de déformation. En 1972, la Saab 99 présentait un système de protection contre les impacts latéraux, complétant les zones de déformation avant et arrière conventionnelles. Cette approche à 360 degrés de la protection contre les impacts représentait une avancée significative, reconnaissant que les collisions réelles pouvaient survenir sous n'importe quel angle.

Ces constructeurs ont également contribué à l'évolution de la conception des zones de déformation en intégrant des considérations liées aux collisions asymétriques et aux impacts à différentes hauteurs. Leurs innovations ont permis de répondre aux défis posés par les collisions entre véhicules de tailles différentes, un problème croissant avec la diversification des types de véhicules sur les routes.

Révolution des tests euro NCAP et impact sur la conception structurelle

L'introduction du programme européen d'évaluation des nouveaux véhicules (Euro NCAP) en 1997 a profondément transformé la conception des zones de déformation. Ces tests standardisés, incluant des impacts frontaux, latéraux et, plus tard, des collisions avec des piétons, ont fourni aux constructeurs des critères objectifs pour évaluer et améliorer la performance de leurs structures déformables. La publication des résultats a également créé une pression commerciale pour améliorer la sécurité, transformant celle-ci d'un argument marketing secondaire en priorité de conception.

L'Euro NCAP a introduit le concept d'impact frontal décalé à 40% et à 64 km/h, simulant les collisions réelles plus précisément que les tests antérieurs d'impact frontal complet. Cette configuration a révélé des faiblesses dans les conceptions existantes et a poussé les ingénieurs à développer des zones de déformation asymétriques capables de gérer efficacement ce type d'impact particulièrement dangereux. Les tests incluaient également des mannequins instrumentés sophistiqués mesurant les forces exercées sur différentes parties du corps, ce qui a permis une optimisation précise des structures déformables.

Les critères de plus en plus stricts de l'Euro NCAP ont conduit à l'intégration de structures de déformation plus complexes, avec des chemins de charge multiples et des mécanismes d'absorption d'énergie avancés. Les véhicules modernes 5 étoiles Euro NCAP comportent typiquement plus de dix zones de déformation distinctes, chacune optimisée pour un type d'impact spécifique et travaillant en harmonie avec les autres systèmes de sécurité passive.

Intégration des aciers à très haute résistance (THLE) depuis les années 2000

L'avènement des aciers à très haute limite d'élasticité (THLE) dans les années 2000 a marqué un tournant décisif dans la conception des zones de déformation. Ces aciers avancés, offrant des résistances à la traction supérieures à 780 MPa, permettent de créer des structures plus légères tout en étant plus résistantes. Leur intégration a permis aux ingénieurs de concevoir des zones de déformation plus efficaces et des cellules de sécurité plus robustes, sans compromettre l'efficacité énergétique des véhicules.

Les aciers THLE présentent également l'avantage de pouvoir être formés avec précision pour créer des structures géométriquement complexes. Cette caractéristique a permis le développement de zones de déformation avec des profils de résistance variables le long d'un même composant, optimisant ainsi le comportement d'écrasement. La technique du tailored blanking , qui consiste à souder ensemble des tôles d'acier de différentes épaisseurs et résistances avant formage, illustre parfaitement cette approche.

L'utilisation stratégique de différentes nuances d'acier dans un même véhicule est désormais courante. Une voiture moderne peut contenir jusqu'à 5-6 types d'acier différents, des aciers doux dans les zones destinées à absorber l'énergie, aux aciers au bore ultra-résistants (jusqu'à 1500 MPa) pour les composants critiques de la cellule de sécurité. Cette distribution précise des matériaux en fonction de leur rôle dans la gestion d'impact représente l'une des innovations les plus significatives en matière de sécurité passive.

Analyse technique des zones de déformation avant

Les zones de déformation avant constituent la première ligne de défense lors d'une collision frontale, le type d'accident le plus fréquent et potentiellement le plus mortel. Leur conception représente un défi d'ingénierie complexe, nécessitant de concilier l'absorption maximale d'énergie, le comportement prévisible lors de l'impact et les contraintes d'espace, d'esthétique et d'aérodynamisme. Les constructeurs ont développé diverses solutions techniques pour optimiser ces structures critiques.

Longerons à absorption progressive d'énergie

Les longerons avant représentent les éléments structurels les plus importants pour l'absorption d'énergie lors d'un impact frontal. Ces poutres longitudinales, généralement en acier, sont conçues pour se déformer de manière contrôlée et séquentielle. Leur section, leur épaisseur et leur géométrie sont minutieusement calculées pour offrir une résistance progressive à l'écrasement, maximisant ainsi l'absorption d'énergie tout en limitant les forces transmises à l'habitacle.

Les longerons modernes présentent souvent une conception à résistance variable. Leur partie avant est conçue pour s'écraser facilement, initiant le processus d'absorption d'énergie, tandis que leur section arrière, plus robuste, se déforme uniquement lors d'impacts plus violents. Cette variation progressive de résistance permet d'adapter la réponse du véhicule à la sévérité de l'impact, optimisant la protection des occupants dans diverses situations de collision.

Une innovation significative dans la conception des longerons est l'introduction de déclencheurs de déformation ou crash initiators . Ces entailles, perforations ou modifications localisées de la géométrie sont stratégiquement placées pour guider le mode d'écrasement du longeron. En créant des points de faiblesse contrôlés, les ingénieurs peuvent prédéterminer exactement où et comment la structure commencera à se déformer, assurant un comportement cohérent et optimal lors de chaque impact.

Structures en nid d'abeille et leur comportement en compression

Les structures en nid d'abeille représentent une solution légère et efficace pour l'absorption d'énergie dans les zones de déformation avant. Ces structures, composées de cellules hexagonales répétitives, offrent un excellent rapport entre légèreté et capacité d'absorption d'énergie. Leur comportement en compression est particulièrement adapté à la gestion des impacts, car elles se déforment de manière progressive et prévisible.

Le principe d'absorption d'énergie des structures en nid d'abeille repose sur le flambage contrôlé des parois cellulaires. Lors d'un impact, ces parois fléchissent et se plient selon des modes de déformation prédéterminés, convertissant l'énergie cinétique en travail de déformation. La force nécessaire pour comprimer ces structures reste relativement constante tout au long du processus d'écrasement, ce qui en fait des absorbeurs d'énergie idéaux.

Ces structures sont particulièrement utilisées dans les zones entre le pare-chocs et les longerons principaux, formant ce qu'on appelle les "crash boxes" ou boîtes de collision. Fabriquées en

aluminium ou en polymères renforcés, ces structures hexagonales absorbent une quantité significative d'énergie avant même que les longerons principaux ne commencent à se déformer. Leur présence permet de gérer plus efficacement les impacts à faible vitesse, réduisant les coûts de réparation tout en améliorant la protection des occupants.

Mécanismes de pliage contrôlé des éléments structurels

Le pliage contrôlé des éléments structurels constitue une technique d'ingénierie avancée permettant d'optimiser le comportement des zones de déformation. Plutôt que de laisser le métal se comprimer de manière aléatoire, les ingénieurs créent délibérément des schémas de pliage prédéfinis qui maximisent l'absorption d'énergie tout en maintenant l'intégrité structurelle dans les directions critiques. Ces mécanismes sont souvent invisibles à l'œil nu, intégrés dans la géométrie même des composants.

Le principe fondamental du pliage contrôlé repose sur la création de points d'initiation stratégiquement placés. Ces points, sous forme d'encoches, de perforations ou de variations d'épaisseur, créent des zones de concentration de contraintes qui guident le processus de déformation. En maîtrisant précisément l'emplacement et la séquence de ces pliages, les ingénieurs peuvent créer des structures qui absorbent l'énergie de manière optimale, transformant un processus apparemment chaotique en une séquence contrôlée d'événements mécaniques.

Les techniques de pliage programmé les plus sophistiquées utilisent des motifs géométriques complexes inspirés de l'origami. Ces structures, connues sous le nom de "crash origami", exploitent les principes mathématiques des pliages pour créer des zones de déformation qui se compriment de manière extrêmement efficace. Des recherches récentes ont démontré que ces structures peuvent absorber jusqu'à 30% d'énergie supplémentaire par rapport aux conceptions conventionnelles, tout en maintenant une force de compression relativement constante.

Matériaux composites dans les pare-chocs et leur déformation calibrée

L'utilisation de matériaux composites dans les pare-chocs représente une évolution significative dans la conception des zones de déformation avant. Ces matériaux, généralement des polymères renforcés de fibres, offrent une combinaison unique de légèreté, de résistance et de capacité d'absorption d'énergie. Contrairement aux métaux qui se déforment de manière plastique, les composites peuvent se fragmenter de manière contrôlée, absorbant l'énergie à travers la rupture progressive des fibres et de la matrice.

Les pare-chocs modernes sont souvent constitués de plusieurs couches de matériaux composites différents, chacune avec des propriétés mécaniques spécifiques. La couche externe est généralement conçue pour résister aux impacts mineurs et aux abrasions quotidiennes, tandis que les couches internes sont optimisées pour l'absorption d'énergie lors de collisions plus graves. Cette structure en sandwich permet une réponse adaptative en fonction de la sévérité de l'impact, optimisant à la fois la durabilité quotidienne et la protection en cas d'accident.

La déformation calibrée des composites est obtenue grâce à une conception minutieuse de leur microstructure. En contrôlant l'orientation des fibres, leur densité et les interfaces entre les différentes couches, les ingénieurs peuvent prédéterminer exactement comment ces matériaux se déformeront et se fractureront lors d'un impact. Des techniques de fabrication avancées, comme le moulage par injection assisté par gaz ou le RTM (Resin Transfer Molding), permettent de créer des structures composites avec des propriétés variables dans différentes zones du même composant.

Conception des zones de déformation latérale et arrière

Si les impacts frontaux ont longtemps dominé l'attention des concepteurs, les collisions latérales et arrière présentent des défis uniques en matière de protection des occupants. La conception des zones de déformation pour ces types d'impacts a considérablement évolué au cours des dernières décennies, passant de simples renforts à des systèmes sophistiqués intégrant multiple couches de protection. Ces zones sont particulièrement critiques car l'espace disponible pour l'absorption d'énergie est souvent plus limité que dans les structures avant et arrière.

Renforts de portières et poutres anti-intrusion

Les renforts de portières constituent la principale défense contre les impacts latéraux, où la distance entre l'occupant et le point d'impact est minimale. Ces structures, généralement sous forme de poutres horizontales, sont intégrées dans l'armature des portières et conçues pour résister à l'intrusion tout en redirigeant les forces d'impact vers les parties plus résistantes de la carrosserie. Contrairement aux zones de déformation avant, qui sont conçues pour s'écraser progressivement, ces renforts doivent maintenir leur intégrité structurelle pour protéger l'espace vital des occupants.

Les poutres anti-intrusion modernes sont généralement fabriquées en acier à ultra-haute résistance (UHSS), pouvant atteindre des résistances à la traction de 1500 MPa ou plus. Leur section et leur géométrie sont optimisées pour maximiser la rigidité tout en minimisant le poids. Une innovation récente consiste à utiliser des poutres à section variable, plus épaisses et résistantes au niveau de la zone d'impact probable, et plus légères aux extrémités où elles se connectent à la structure du véhicule.

Ces renforts travaillent en conjonction avec d'autres éléments structurels, formant un système intégré de protection latérale. Les montants B, qui séparent les portes avant et arrière, sont particulièrement renforcés et conçus pour servir d'ancrage aux poutres des portières. Cette approche systémique assure que l'énergie d'un impact latéral est distribuée efficacement à travers la structure du véhicule, plutôt que concentrée au point d'impact.

Protection spécifique contre les impacts de type t-bone

Les collisions de type T-bone, où un véhicule percute perpendiculairement le côté d'un autre, représentent l'un des scénarios d'accident les plus dangereux. Pour contrer ce risque spécifique, les constructeurs ont développé des systèmes de protection dédiés qui vont au-delà des simples renforts de portières. Ces systèmes intègrent des structures de déformation latérale qui commencent à absorber l'énergie avant même que l'impact n'atteigne les renforts principaux.

Une approche innovante consiste à créer une zone de déformation dans le bas de caisse du véhicule, souvent la première structure touchée lors d'un impact latéral. Ces zones sont conçues avec des sections à résistance variable, offrant une absorption d'énergie progressive tout en maintenant l'intégrité structurelle nécessaire pour supporter le poids du véhicule. Certains constructeurs intègrent également des absorbeurs d'énergie spécifiques dans les panneaux de porte, généralement sous forme de mousses à densité variable ou de structures alvéolaires.

Les sièges eux-mêmes sont désormais conçus comme partie intégrante du système de protection contre les impacts latéraux. Leurs armatures renforcées et leurs rembourrages spécifiques contribuent à la protection des occupants en cas d'intrusion latérale. Cette approche holistique, combinant structures de carrosserie et éléments intérieurs, illustre l'évolution de la conception des zones de déformation vers une vision systémique de la sécurité passive.

Système de protection arrière de la renault mégane et ses innovations

Le système de protection arrière développé par Renault pour la Mégane représente une avancée notable dans la conception des zones de déformation arrière. Ce système, baptisé "troisième voie de charge", illustre parfaitement l'approche moderne de la gestion des impacts. Plutôt que de se fier uniquement aux longerons traditionnels, Renault a introduit une structure centrale supplémentaire qui crée un chemin de charge alternatif lors d'un impact arrière.

Cette innovation repose sur une architecture à trois niveaux d'absorption d'énergie. Le premier niveau, constitué par le bouclier arrière et ses absorbeurs, gère les impacts à faible vitesse sans endommager la structure principale. Le deuxième niveau implique les longerons arrière classiques, qui se déforment progressivement lors d'impacts plus sévères. Le troisième niveau, unique à ce système, est une structure centrale qui s'active lorsque les longerons atteignent leur limite de déformation, redirigeant l'énergie résiduelle vers le plancher et les seuils de porte.

Cette approche multi-niveaux offre une protection supérieure contre les impacts décalés, qui représentent la majorité des collisions arrière réelles. Les tests ont démontré que ce système réduit significativement l'intrusion dans l'habitacle et les risques de rupture du réservoir de carburant, même lors d'impacts à haute vitesse. L'approche de Renault illustre comment une conception intelligente peut optimiser la protection avec des contraintes d'espace limitées, un défi particulier pour les zones de déformation arrière.

Technologies avancées de simulation numérique pour l'optimisation des crashs

L'évolution des zones de déformation programmée est intrinsèquement liée aux progrès des technologies de simulation numérique. Ces outils permettent aux ingénieurs de concevoir, tester et raffiner virtuellement des structures complexes avant même la création de prototypes physiques. La simulation par ordinateur a révolutionné le développement des systèmes de sécurité passive, permettant des itérations rapides et l'exploration de concepts innovants qui auraient été prohibitifs à tester uniquement par des méthodes expérimentales.

Modélisation par éléments finis avec LS-DYNA et PAM-CRASH

La modélisation par éléments finis (MEF) constitue l'épine dorsale des simulations de crash moderne. Des logiciels spécialisés comme LS-DYNA et PAM-CRASH permettent de modéliser avec une précision remarquable le comportement des structures automobiles lors d'impacts. Ces outils décomposent les structures complexes en milliers, voire millions d'éléments simples dont le comportement peut être calculé individuellement, puis agrégé pour prédire la réponse globale du véhicule.

LS-DYNA, développé initialement par Livermore Software Technology Corporation, excelle dans la simulation des phénomènes hautement non-linéaires caractéristiques des crashs automobiles. Son solveur explicite permet de modéliser avec précision les grandes déformations, les contacts multiples et les ruptures de matériaux qui surviennent lors d'un impact. PAM-CRASH, développé par ESI Group, offre des capacités similaires avec une spécialisation particulière dans la modélisation des matériaux composites et des structures en nid d'abeille fréquemment utilisées dans les zones de déformation.

Ces logiciels intègrent des modèles matériaux sophistiqués capables de reproduire le comportement complexe des aciers modernes, des alliages d'aluminium et des composites. Des modèles comme Johnson-Cook ou Gurson-Tvergaard-Needleman permettent de prédire non seulement les déformations élastiques et plastiques, mais aussi l'endommagement progressif et la rupture des matériaux. Cette précision est cruciale pour optimiser les zones de déformation, où le mode exact de défaillance des matériaux détermine leur capacité d'absorption d'énergie.

Tests virtuels et corrélation avec les essais physiques

La valeur des simulations numériques dépend directement de leur capacité à prédire avec précision les résultats d'essais physiques. Un processus rigoureux de validation et de corrélation est donc essentiel pour assurer la fiabilité des modèles virtuels. Ce processus commence généralement par des tests sur des composants individuels, dont les résultats sont comparés aux prédictions des simulations. Les paramètres du modèle sont ensuite ajustés pour réduire les écarts entre prédictions et mesures.

Une fois les modèles de composants validés, des simulations de structures plus complexes sont réalisées et comparées à des tests physiques correspondants. Ces tests intermédiaires peuvent inclure des essais de déformation sur des sous-ensembles comme les longerons avant ou les portières complètes. À chaque étape, les ingénieurs raffinent les modèles pour améliorer leur précision, en portant une attention particulière aux modes de déformation et aux seuils de rupture.

L'étape finale consiste à valider le modèle complet du véhicule par comparaison avec des crash-tests réels. Les métriques de validation incluent non seulement les déformations structurelles mesurées, mais aussi les accélérations enregistrées en différents points et les forces subies par les mannequins d'essai. Grâce à ce processus itératif, les modèles virtuels modernes peuvent prédire avec une précision remarquable le comportement des véhicules lors d'impacts, réduisant considérablement le nombre de prototypes physiques nécessaires au développement.

Optimisation topologique appliquée aux structures déformables

L'optimisation topologique représente une avancée significative dans la conception des zones de déformation. Contrairement aux approches traditionnelles où les ingénieurs définissent explicitement la géométrie des composants, l'optimisation topologique utilise des algorithmes mathématiques pour déterminer la distribution optimale de matériau répondant à des objectifs spécifiques. Pour les zones de déformation, ces objectifs incluent typiquement la maximisation de l'absorption d'énergie sous contraintes de poids et d'espace.

Le processus commence par définir un volume de conception et des conditions aux limites représentant les contraintes physiques du problème. L'algorithme distribue ensuite virtuellement le matériau dans ce volume, retirant progressivement la matière des zones peu sollicitées jusqu'à obtenir une structure qui maximise l'objectif défini. Pour les zones de déformation, des contraintes supplémentaires sont ajoutées pour assurer un comportement d'écrasement progressif et éviter les modes de défaillance catastrophiques.

Les structures résultant de l'optimisation topologique présentent souvent des géométries organiques complexes qui seraient difficiles à concevoir par des méthodes conventionnelles. Ces formes non-intuitives peuvent inclure des nervures disposées selon des motifs complexes ou des variations d'épaisseur subtiles qui guident précisément le processus de déformation. Grâce aux technologies de fabrication avancées comme l'impression 3D métallique ou le formage à chaud, ces géométries optimisées peuvent désormais être produites industriellement, ouvrant de nouvelles possibilités pour l'efficacité des zones de déformation.